INTERVIEW VALEURS ACTUELLES

Procès des attentats du 13-Novembre : « Je vais tout faire pour que Valls, Cazeneuve et Le Drian soient dans le box des accusés » Patrick Jardin a publié le 25 août un ouvrage intitulé Pas devant les caméras ! (Presses de la délivrance) en hommage à sa fille Nathalie, assassinée le 13 novembre 2015 au Bataclan, à Paris. Ce père en colère espère que les procès qui débuteront en 2021 permettront d’engager la responsabilité des terroristes mais aussi de certains politiques. Entretien. Valeurs actuelles. Le ministre de l’Intérieur a récemment déclaré que l’islam sera « la religion qui aura le moins de difficulté avec la République ». Partagez-vous son avis ? Patrick Jardin. C’est un scandale, mais ça ne m’étonne pas. Darmanin, il a deux excuses. D’abord parce qu’il est à moitié musulman puisque son deuxième prénom est Moussa (seul son grand-père était musulman, ndlr), et il est maire de Tourcoing. J’ai travaillé 13 ans dans ce coupe-gorge, où je tenais à l’époque un garage. Quand je partais en vacances, j’enlevais les roues des voitures, je les mettais dans mon habitation personnelle pour éviter qu’on me vole des voitures. Darmanin est maintenant ministre de l’Intérieur, ça me choque car il n’a pas su faire respecter la loi républicaine dans sa propre ville en tant que maire, alors ministre de l’Intérieur c’est une grave erreur pour moi. A l’époque, j’étais cambriolé toutes les semaines et j’étais devenu inassurable. Tous les six à huit mois, je devais chercher une autre compagnie parce que chaque fois j’étais viré. Pensez-vous que la nomination d’Eric Dupond-Moretti au ministère de la Justice soit aussi une erreur ? Dupond-Moretti a dit que la France n’était pas un coupe-gorge. Il oublie une chose, c’est qu’il y a une quinzaine d’années, je me suis fait attaqué en plein centre de Lille à 21h par « trois chances pour la France » qui voulaient me prendre ma BMW, il y en a deux qui ont réussi à se sauver et le troisième je l’ai gravement blessé. Le dimanche matin, j’étais sorti du commissariat à 5h, j’étais presque devenu l’accusé dans cette affaire. Trois à quatre mois après, un huissier est venu sonner à ma porte et m’a dit que j’étais convoqué au tribunal parce que la Caisse primaire d’assurance maladie demandait le remboursement des frais médicaux. A l’époque, je me suis dit : « Je vais voir Dupond-Moretti qui était l’avocat le plus connu à Lille. » J’avais pris un coup de couteau entre le pouce et l’index. Trois ou quatre points de suture. Il m’a dit : « Je ne peux pas vous défendre, je suis l’avocat des truands, pas des honnêtes gens. » C’est un excellent avocat pour les crapules, puisqu’on le surnomme « Acquittator », pour les honnêtes gens, j’en suis moins sûr. En 2021 s’ouvriront les procès des attentats du 13-Novembre. Qu’en attendez-vous ? Je vais tout d’abord m’astreindre à assister à un maximum de séances. J’attends que les terroristes soient condamnés. Mais je vais tout faire pour que dans le box des accusés on trouve également des personnalités politiques. Je pense au trio Valls, Cazeneuve, Le Drian. Valls pour un problème d’ego. Il a refusé de lire la liste des islamistes que lui avaient fourni les services secrets français. Cette liste avait été établie avec les services secrets syriens. Il a refusé de prêter attention à cette liste sous prétexte que les services secrets syriens avaient participé à l’élaboration de cette liste. C’est une très lourde responsabilité. Cazeneuve savait ce qui allait se passer. Ça, j’en suis certain. Le matin de l’attentat, il y a eu une simulation d’attentats de masse et il a confié à son préfet qu’il s’attendait à un attentat de 130 morts. Ou il s’appelle Madame Soleil et pas Monsieur Cazeneuve ou alors il savait. Où en êtes-vous dans vos démarches juridiques contre l’Etat français ? J’ai déposé une plainte contre l’Etat français, contre la ville de Paris, une plainte contre l’Etat belge, et j’ai redéposé plainte contre l’Etat français parce qu’il veut faire revenir des djihadistes qui sont actuellement en Syrie. J’ai porté plainte pour mise en danger de la vie d’autrui. Ce ne sont, selon moi, même plus des Français de papiers car ils les ont déchirés. Je ne crois pas à la déradicalisation. Ces djihadistes sont éduqués pour mentir de façon éhontée. Ils ont été condamnés à mort et maintenant ils se souviennent qu’en France on a eu un ministre qui se nomme Badinter et qui a supprimé la peine de mort. C’est la seule façon pour eux de sauver leur vie. J’estime que l’Etat syrien, qui les a condamnés à mort, et que l’Etat irakien doivent se dépêcher d’exécuter la sentence. Cela clorerait tout débat. Avant les droits de l’homme, il y a d’abord les droits des victimes. Quand je vois des gamins qui tuent des soldats syriens revêtus d’une chasuble orange, je ne peux pas admettre que ces gamins reviennent dans mon pays. Ce ne sont plus des enfants, ce sont des monstres. Pourquoi mettez-vous en cause Manuel Valls, Premier ministre en 2015 ? Manuel Valls habitait à 300 mètres du Bataclan quand le capitaine du bataillon du 31/7 de Reims a entendu des tirs. Ces hommes étaient censés protéger Manuel Valls qui habitait rue Keller. Quand ce capitaine est arrivé sur place, on lui a dit de faire demi-tour et de rentrer où ils étaient. Depuis, ils ont reçu une médaille de la sécurité intérieure et ont été envoyés en Nouvelle-Calédonie. Ce n’est pas la première fois que vous assistez à un procès puisque vous avez assisté à celui de Jawad Bendaoud, le « logeur de djihadistes ». Qu’en avez-vous retenu ? J’ai assisté au procès en première instance de Jawad Bendaoud et à celui en appel. En première instance, j’ai fait un scandale dans la salle. J’ai dit à la juge que si la justice ne faisait pas son travail, je me ferais justice moi-même. J’ai fait appel de la décision de relaxe de Jawad Bendaoud, et en appel il a été condamné à cinq ans. Il s’est depuis pourvu en cassation. Sa peine est scandaleuse. Dans cet appartement que Jawad Bendaoud s’était approprié illégalement, les enquêteurs ont retrouvé un rouleau de scotch sur lequel figurait l’ADN de Bendaoud, or ce rouleau a servi à fabriquer la ceinture d’explosifs d’un des terroristes. Pour moi, c’est une complicité de meurtre. Il aurait dû passer aux assises. Les magistrats se sont faits abuser et les avocats de la partie civile ont été très faibles dans leurs réclamations. J’ai contacté une autre avocate qui m’a dit que ça ne tenait pas. Résultat : il n’est passé qu’en correctionnelle. Il avait déjà un lourd casier, il a tué son ami avec une feuille de boucher, il a de multiples autres condamnations. Votre combat contre la venue du rappeur Médine au Bataclan a été un succès. Pourtant le Premier ministre de l’époque Edouard Philippe ne vous a pas soutenu, pourquoi ? J’aurais aimé que pour une fois tous les bords politiques demandent l’annulation du concert de Médine, qui était un crachat à la face des Français. Un proche des Frères musulmans ne pouvait pas chanter là où 100 personnes avaient été tuées. On avait réussi avec des amis à réunir 158 cars qui devaient venir de toute la France, et si ça ne suffisait pas, on avait prévu une action hors-la-loi qui aurait empêché le Bataclan de présenter le spectacle. Contrairement à ce que dit Médine, ce n’est pas lui qui l’a annulé, c’est la direction du Bataclan, prévenue par les services secrets français, qui a préféré l’arrêter. Les services secrets savaient l’ampleur que ça prenait. Edouard Philippe avait répondu au sénateur Meurant qu’il ne voyait pas pourquoi il aurait interdit ce concert, car pour lui il n’y avait pas de trouble à l’ordre public. Je me suis donc employé à créer le trouble. J’ai aussi appris qu’Edouard Philippe connaissait Médine et qu’ils fréquentaient le même club de Boxe. Il a accordé en tant que maire du Havre une subvention de 14 500 euros à ce club. Moi, je joue dans un petit club où il y a 800 licenciés et où on touche 4 500 euros de la mairie. Votre ouvrage est d’ores et déjà un succès puisqu’il est encore en rupture de stock… On est à la troisième réédition. J’étais premier en termes de ventes chez Amazon la semaine dernière en ne bénéficiant d’aucune publicité. J’ai d’ailleurs fait 220 000 vues dans l’émission radio d’André Bercoff, plus qu’Onfray le lendemain. Je n’ai plus rien à perdre. Je veux venger l’honneur de ma fille. Je veux qu’ils payent pour les 130 morts et les 485 blessés qui porteront des stigmates toute leur vie.